Sri Lanka, plantation de thé à Nuwara Eliya (© Sylvie Strobl)

dimanche 15 décembre 2013

Le Voyage de l'éléphant

José Saramago
Traduit du portugais par Geneviève Leibrich
Points n°2458


Lisbonne, 1551 : Joao III, roi du Portugal, est confronté à une question importante : quel présent offrir à son cousin, Maximilien d'Autriche, à l'occasion de son mariage ? La cour portugaise, qui veut à tout prix briller par son originalité, opte pour un présent de taille : un éléphant d'Asie arrivé de Goa deux ans auparavant, qui répond au curieux nom de Salomon. 
Encore faut-il pouvoir acheminer l'animal à Vienne ! Les moyens de l'époque étant limités, c'est à pieds, ou plutôt à pattes, que se fera la grande majorité du trajet. Qu'à cela ne tienne. Salomon n'est pas venu seul des Indes : son cornac, Subhro, était du voyage et c'est à lui que sera confiée la mission de conduire le pachyderme dans la capitale autrichienne, en passant par les plateaux de Castille, la Méditerranée, Gênes et surtout la route des Alpes.

Voilà donc l'équipage en route. Imaginez la surprise des villageois lorsque la caravane arrive. Car l'éléphant voyage en convoi : il est escorté d'un peloton de cavalerie ainsi que d'un char à boeufs transportant le fourrage destiné à le nourrir ! Chacun de s'étonner, de se méfier, d'être impressionné...  Un prêtre est bien décidé à exorciser cet animal qu'il ne juge pas très catholique alors que, quelques jours plus tard, un autre veut s'en servir pour faire croire aux miracles !

Au gré du voyage, des rencontres et des péripéties, José Saramago met en évidence la sagesse de Salomon et de son cornac, par opposition aux querelles de clocher ou de régiments qui se déroulent. La sagesse d'un éléphant, me direz-vous ? L'auteur nous raconte la légende de Ganesh, célèbre dieu à tête d'éléphant, figure tutélaire du panthéon indien et, accessoirement, dieu des voyageurs !

L'histoire - bien réelle - est plaisante et assez drôle. Mais ce qui fait l'originalité du récit, c'est avant tout la forme. Digressions, interpellations du lecteur... le tout dans un style un peu déconcertant durant les premières pages puisque le texte se présente de manière compacte, sans sauts de paragraphes ni dialogues apparents, sans majuscule là où l'usage nous y a habitués. Du coup, la lecture est assez lente et requiert une attention particulière, sans doute pour nous donner l'impression d'avancer au même rythme que Salomon ! Mais une fois ce rythme pris, il ne reste plus qu'à se laisser porter par le récit et à en savourer tant l'humour que la philosophie. 

Laissons le mot de la fin à l'auteur : "Entre parler et se taire, un éléphant préférera toujours le silence, voilà pourquoi sa trompe a tellement poussé, laquelle, outre qu'elle transporte des troncs d'arbres et sert d'ascenseur au cornac, a l'avantage de représenter un obstacle sérieux à toute loquacité incontrôlée".

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