Sri Lanka, plantation de thé à Nuwara Eliya (© Sylvie Strobl)

dimanche 17 novembre 2013

Le petite pièce hexagonale

Yoko Ogawa
Traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle
Babel n°800

Voilà un récit tout simple en apparence mais qui, en réalité, nous mène de manière quasi-poétique sur les chemins de la psychanalyse et de l'introspection. La narratrice - une jeune femme un peu perdue qui souffre de violents maux de dos - se rend à la piscine pour soulager ses douleurs. Dans les vestiaires, elle est attirée par une autre nageuse qui accompagne une femme plus âgée. Sans savoir ni comprendre pourquoi, elle se met à les suivre, intriguée par la relation - ou plutôt l'absence de relation - qui semble unir les deux femmes.

Un soir, leur chemin la mène en dehors de la ville, passant à travers bois pour rejoindre des immeubles abandonnés. C'est là que la narratrice fait la découverte de "la petite pièce à raconter". Dans l'un des immeubles, la loge du gardien sert de salle d'attente à des personnes silencieuses qui, tour à tour, entrent dans une petite pièce hexagonale. Qu'y a-t-il à l'intérieur ? Qu'y fait-on ? "A vrai dire, il n'y a rien dans la petite pièce à raconter. Juste un banc permettant à une personne de s'asseoir et une lampe. C'est tout. (...) On y raconte (...). Ce que l'on aime, ce qu'on déteste, ce que l'on cache au fond de son coeur ou ce que l'on n'arrive pas à cacher, ce qui nous embarrasse, nous réjouit, des histoires du passé ou de l'avenir, la vérité ou n'importe quoi, tout est possible. On dit ce qu'on a envie de dire à ce moment-là".

D'abord sceptique, la narratrice retourne plusieurs fois dans la pièce hexagonale, se perdant systématiquement dans les bois avant de retrouver son chemin. Il lui faudra plusieurs visites pour enfin se délivrer d'un secret qui lui pèse et pourrait être la clé de ses souffrances physiques et psychiques.

J'ai déjà écrit à quel point j'étais fascinée par la capacité de certains auteurs à dire beaucoup en peu de mots, dans une simplicité presque déconcertante. A coup sûr, Yoko Ogawa fait partie de ceux-là. Son récit - court, presque banal -  nous plonge dans une atmosphère feutrée, un peu mystérieuse, quasi envoûtante. Si elle nous mène sur les chemins de l'introspection, l'auteur le fait subtilement, par petites touches. Maniant avec brio l'art de la métaphore, elle évoque plus qu'elle n'explique. Mais au final, c'est bien du pouvoir de la parole dont il s'agit : la parole libératrice, les mots qui libèrent des maux.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Pour vous aider à publier votre message, voici la marche à suivre :

1) Ecrivez votre texte dans le formulaire de saisie ci-dessous
2) Si vous avez un compte, vous pouvez vous identifier dans la liste déroulante Commentaire
Sinon, vous pouvez saisir votre nom ou pseudo par Nom/URL
3) Cliquer sur Publier

Si vous vous identifiez comme "anonyme" et que nous nous connaissons, laissez-moi un petit indice afin que je puisse vous reconnaître !
Merci d'avance !